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Réussir son safari au Parc Kruger

AFRIQUE DU SUD – On a vu le Big Five ! Et bien plus encore en 5 jours et 4 nuits magiques au Parc Kruger. Carte, camps et infos pratiques : nos conseils pour visiter la plus grande réserve animalière du pays.

1er janvier. Après plus de 24 heures de trajet et un réveillon passé inaperçu (tiens, Emirates n’offre même pas une coupette de champagne ou une papillote en chocolat à bord, c’est moche), on pose les pieds en Afrique du Sud. À Johannesburg, plus précisément. Mais on ne s’attarde pas dans la capitale ; on y reviendra, c’est d’ici que part notre vol retour pour l’Europe dans moins d’un mois.

Visons plus loin. À l’est, pas loin de la frontière du Mozambique : le Kruger National Park. Dans notre petite cacahuète de location, on roule toute une journée (plus de 500 kilomètres) pour arriver aux portes de la plus grande réserve animalière d’Afrique du sud. A la tombée de la nuit, on pose nos sacs au lodge A Traveller’s Palm, à Phalaborwa, l’une des entrées du parc. Demain, on se lève très tôt. Les animaux de la savane nous attendent.

                                   

LE PARC KRUGER EN CHIFFRES
20 000.  Le nombre de kilomètres carrés que compte la plus grande réserve animalière d’Afrique du Sud, 350 km du nord au sud, 60 km d’est en ouest. C’est l’équivalent d’Israël ou du Pays de Galles. Impressionnant, non ?
1982. Le nombre d’espèces de plantes recensés dans les six différents  écosystèmes du Parc Kruger.
1926.  L’année de création de ce parc national par Paul Kruger, président boer de la République sud-africaine du Transvaal dans le but  de protéger les animaux sauvages tout en les laissant dans leur environnement naturel.
544. 
Le nombre de rhinocéros disparus à cause des braconniers dans le seul parc Kruger entre le 1er janvier 2015 et le 27 août de la même année. Attristant.
507.
 Le nombre total d’espèces d’oiseaux présentes dans le parc. 253 sont endémiques.
147. Au total, 147 espèces de mammifères ont été dénombrées en 2004 dans le parc.
114. C’est le nombre d’espèces de reptiles dans le parc.
21. Le nombre de camps en tout genre répartis sur le territoire du Kruger.
5. Les incontournables animaux du Big 5 (lion, rhinocéros, buffle, léopard et éléphant), cibles préférées des chasseurs d’hier et aujourd’hui des touristes, sont bien présents dans le parc.


Préparer son séjour au parc Kruger : les conseils

Attention, pour visiter le parc dans de bonnes conditions, mieux vaut ne pas improviser. Surtout en pleine saison. Les logements à l’intérieur du parc sont limités, encore plus si on vise un budget économique. On vous liste quelques conseils pour préparer au mieux votre séjour.

1 – Tracez son itinéraire. Avant de réserver, il vous faut savoir où vous allez passer la ou les nuits à venir. En roulant entre 30 et 50 km/h en moyenne, on ne traverse pas le parc en une journée et ce n’est de toute façon pas le but. Choisissez une partie du parc et explorer là tranquillement, jusqu’au coucher de soleil.

NOTRE CHOIX : en cinq jours, cibler le centre et le sud du parc, ce dernier secteur étant réputé pour abriter la plus grosse concentration de mammifères du parc. Entrée par la porte centrale Phalaborwa, sortie par la porte sud Malelane.

2 – Réserver ses nuits dans les différents camps du parc. Rien ne vous empêche de passer la journée à l’intérieur et de sortir dormir dans l’une des villes-entrées du parc. Mais il y a des logements dans le Kruger, et pour nous dormir dans l’un de ses endroits prolonge la magie du lieu : on peut ainsi profiter jusqu’aux dernières minutes des animaux à l’intérieur de la réserve et le matin, les portes des camps s’ouvrent une heure plus tôt que celles à l’exterieur du parc.
Il existe différents types de camps, du mieux équipé au plus simple (bungalow, lodge, tente aménagé, location d’emplacement…). La réservation s’effectue sur le site officiel des parcs nationaux d’Afrique du sud. Vous aurez le choix des logements et leurs prix correspondants, en fonction des camps.

NOTRE CHOIX (voir carte ci-dessus):
– bungalow au Letaba camp (grand et parfaitement équipé, ce camp compte piscine, restaurant, supérette, station service…). Tarif une nuit : 992,75 rands, soit 56,30 euros.
– tente aménagée au Tamboti camp (bloc sanitaire et espace cuisine communs, pas d’accueil, ni de piscine, de restaurant ou de supérette pour une nuit au plus près de la nature). Tarif pour une nuit : 551 rands, soit 31,30 euros.
– bungalow et tente aménagé au Skukuza camp (le plus grand de tous, avec tous les équipements pensables ; pas le plus familial mais très central). Tarif : pour une nuit en bungalow, 1064 rands, 60,40 euros ; une nuit en tente, 522,34 rands, 29,70 euros.
Nous avons dû jongler avec des logements plus ou moins chers. Même en réservant trois semaines à l’avance, beaucoup de tentes aménagées étaient déjà prises.

3 – En validant vos réservations, vous pouvez payer l’entrée dans le parc pour chaque journée. Bonne nouvelle : en dormant 4 nuits, nous n’avons payé que 4 tickets d’entrée par personne, et ce même si on est rester cinq jours pleins dans le parc. Tarifs entrée jour par personne : 280 rands, soit 15,90 euros.

4 – Faites vos courses avant de rentrer dans le parc et le plein d’essence. Des restaurants et des supérettes sont disponibles dans certains camps. Mais les prix sont forcément plus élevés. Il y a également des stations essences régulièrement, dans les camps : les prix sont un poil plus élevés mais rien d’exagéré.

5 – Acheter le guide à l’entrée du parc. Il a une carte détaillé (la seule que vous aurez) et la liste, e nimages, de tous les animaux visibles. Ca vaut bien les quelques rands réclamés. Il existe en langue française. Bon, il n’y en avait plus quand on est passé, mais l’anglais permet de réviser votre vocabulaire de la savane !

6 – Préparer ses pique-niques la veille. Il n’est pas possible de s’arrêter n’importe où dans le parc, prévoyez aussi vos journées en fonction de vos pauses déjeuners. Sachant que vous n’aurez pas toujours de quoi cuisiner sur place.

BON À SAVOIR : LES INFOS PRATIQUES POUR VISITER LE PARC KRUGER 
# Dans le parc Kruger, les visiteurs se baladent avec leur propre véhicule. Mais des sorties accompagnées sont organisées par les principaux camps.
# Vitesse autorisée : 30 km/h sur les sentiers ; 50 km/h sur les routes.
#
Il est interdit de sortir du véhicule en dehors des zones autorisées.
# Les portes des camps s’ouvrent à 4 h 30 en été (décembre-février) ; les portes extérieures à 5 h 30. Toutes ferment à 18 h 30. Il ne faut donc plus être sur les pistes ou les routes à cette heure-ci. Toute personne ne respectant pas les horaires s’expose à une amende.
# Il existe des cartes du parc affichées dans les principaux camps : les touristes indiquent à l’aide de magnets où ils ont vu lion, léopard, guépard, éléphant, buffle. Les rhinocéros, cibles des braconniers, font l’objet d’une protection particulière et ne sont donc pas renseignés sur ces cartes.
# Les jumelles ne sont pas indispensables (on a fait sans) mais c’est carrément un plus.
# On avait un objectif 55-210 mm pour notre appareil photo hybride Sony, suffisant pour s’amuser à prendre de belles photos. Et vidéos.
# Avantage de la saison estivale : les animaux sont accompagnés de leurs petits nés au printemps.
# Pas forcément besoin de 4×4 pour observer les animaux. Cependant un véhicule haut peut être un plus pour voir les bébêtes lorsque la végétation est un peu haute.
# En fonction de la saison, renseignez-vous sur la présence de moustiques. Gare : la malaria est une maladie encore présente à l’intérieur du parc Kruger.
# Quand vous voyez une voiture arrêtée, 9 fois sur 10 elle observe un animal…
# Règle essentielle du safari : communiquer et partager les informations avec les autres véhicules.
# Règle n°2 : laissez faire la chance.

CARNET DE BORD

JOUR I. Il est 5 heures du matin. Le réveil sonne. Vite, une grande journée nous attend. On prépare le pique nique, on petit-déjeune, on fourre toutes nos affaires dans notre petite voiture de location et on roule jusqu’à l’entrée Phalaborwa du parc. Il est 5 h 30, les portes s’ouvrent. Nos réservations et nos tickets d’entrée imprimés nous autorisent le passage. On s’attendait à un topo sur la sécurité, les règles à suivre… Rien. On va conduire notre propre véhicule dans un immense parc rempli de prédateurs et, exception faite du panneau de consignes à l’entrée du parc, personne ne nous recommande rien. Surprenant, mais ici, le bon sens semble prévaloir sur le reste.

On roule dix minutes à l’affût du moindre mouvement dans les buissons. On quitte l’asphalte pour les sentiers poussiéreux. Il fait déjà chaud. On n’ose pas encore rouler toute vitre ouverte. Si jamais un lion nous sautait à la gorge… Là, sur le côté, des impalas, partout à quelques mètres de la voiture. Première surprise : s’ils sont sur leurs gardes, ils sont loin d’être effrayés par les voitures. On est seuls, dans notre quatre-roues à l’arrêt et on observe des animaux sauvages libres. Le plus communs des animaux du parc (les Sud-Af’ surnomment l’impala, le « McDonalds du bush », « parce qu’il y en a partout« ) nous rend déjà euphoriques. On ne sait pas encore ce qu’on va voir…

On continue. On roule à 30 km/h, souvent moins. Les yeux grands ouverts, on capte tous les signes d’une nature qui est déjà bien réveillée, elle aussi. C’est la meilleure heure de la journée pour les bêtes, après il fera trop chaud. Des girafes devant nous. Un buffle en bordure de route. Des éléphants au loin. Des hippopotames, des zèbres, des gnous, des antilopes en tout genre…

On explore le parc à petits pas, stoppant notre voiture à la moindre rencontre. Etonnamment, les véhicules sont moins nombreux que l’on imaginait. Il est facile de s’isoler et de ne croiser personne pendant des dizaines de minutes. Il suffit de quitter les routes principales. On fait une pause pour déposer nos affaires dans le bungalow du camp Letaba. Et aussi pour faire un plouf dans la piscine. Écologiquement discutable, la présence de piscines dans les plus gros camps du parc sont salvatrices à 14 heures, quand le thermomètre dépasse allègrement les 40 degrés.

Deux heures de break et c’est reparti. Il nous reste jusqu’à 18 h 30 pour explorer le secteur de Letaba et sa rivière. Quand on approche  de 18 heures, la température tombe et avec elle, la nature reprend vie. Tous nos sens sont en éveil. Un éléphant bloque la circulation. Ici, l’animal est roi. Tant qu’il n’a pas décidé de bouger, il serait dangereux de provoquer la grosse bête, parfois irascible. Plus que le lion, les véhicules doivent craindre la colère des gros pachydermes, de leurs cousins rhinocéros ou encore des incontrôlables hippopotames. Plusieurs tonnes de muscles qui réduiraient la carrosserie du plus gros 4×4 sud-af’ en miettes. L’heure de la fermeture des portes des camps approchent. Des amendes sont versées aux touristes qui trainent dans le parc après 18 h 30. Ça nous arrache le coeur de devoir rejoindre notre bungalow alors que l’on croise notre première hyène. On est épuisés. Une première journée riche en émotion. Il va falloir reprendre des forces. Il nous reste quatre jours d’exploration.

JOUR II. Réveil 4 h 30, heure d’ouverture des portes à l’intérieur du parc (une heure avant l’ouverture extérieure). Aujourd’hui on descend vers le secteur Olifants, connu pour être un repère de lions. Nous n’avons toujours pas vu de guépard, de rhino, de lion, ou de léopard. Et c’est pas faute d’avoir cherché. On va l’apprendre bien assez vite. Le safari est avant tout une question de chance : être au bon endroit au bon moment.

Zèbres, girafes, impalas, gnous et bien d’autres font notre bonheur ce matin. Ce qu’on préfère : s’arrêter sur l’un des nombreux points d’eau marqué sur la carte et patienter. Attendre, parfois en vain, parfois avec une récompense à la clé. Comme sur la Satara N’wanetsi Road où une hyène prend le bain sous le regard impassible d’un groupe de vautours. Antilopes et zèbres, eux, ont fui à l’arrivée des charognards. Comme un documentaire animalier, là, sous nos yeux.

On a pris goût à la pause piscine de la mi-journée. Rafraîchissante à l’heure où les bêtes font la sieste à l’ombre des arbres. Sauf qu’on est loin de notre camp du soir, alors ce midi, on s’invite au Satara camp. Une zone est prévue pour les visiteurs jour, sauf qu’il n’y a pas de piscine. Coup de bluff, on improvise devant le gardien de la piscine prétendant attendre le check in. Et ça passe. Plouf !

À 16 heures on repart vers notre camp pour la nuit : le Tamboti, moins équipé, plus proche de la nature. Ce soir on dort sous la tente. Il fait encore chaud sur la route et les animaux se cachent. Passage à vide. La magie du safari est imprévisible. De longs moments sans vie peuvent succéder aux rencontres les plus infortuites. Tiens, un attroupement de voiture. L’équation est simple : « voiture arrêtée = animal », « plusieurs voitures arrêtées = big 5 ou félins ». On n’a pas de jumelles alors pas facile de repérer un animal surtout si on sait pas ce que l’on cherche. Nos voisins Sud-Af’ nous explique : un guépard fait gentiment la sieste sous un arbre. On aperçoit tout juste sa robe tachetée. Le gros matou est un habitué du coin. Ces touristes l’ont déjà croisé. Nous, c’est notre premier félin. Un peu loin certes, mais l’excitation est là.

Un peu plus loin, ce sont deux hyènes malodorantes qui font la sieste en contrebas de la route, à quelques mètres de nous. On se dirige vers le waterhole devant le camp Orpen, à quelques kilomètres du nôtre. Un hippopotame nous y attend. Il est temps de rentrer. STOP ! Un rhinocéros, UN RHINOCEROS. À une cinquantaine de mètre de la route, il broute tranquillement, un brin méfiant. L’heure tourne mais on ne peut pas passer à côté d’un moment pareil. À contrecoeur on abrège la rencontre.  500 mètres plus loin un embouteillage bloque le sentier qui mène au Tamboti camp. On interroge nos voisins de voiture : un léopard se repose derrière un arbuste. Impossible de la voir clairement. On le devine à peine.

18 h 28. Il faut qu’on y aille. Immense frustration, on était tout près d’apercevoir l’une des bêtes les plus recherchées du parc. On fait le tour du camp, personne. Pas d’accueil. Un touriste qui s’installe nous explique que l’accueil se fait au camp Orpen, à quelques kilomètres. Zut de zut, on est complètement en retard. On repart frôlant les 50 km/h autorisés. Devant le léopard, certaines voitures bravent encore le couvre-feu. On n’a pas plus de chance qu’à l’aller. On fonce. Un éléphant nous bloque la route. La savane est en grande forme ce soir. On arrive à éviter toute amende en expliquant (de bonne foi) notre retard. On repart vers notre camp. Le léopard est définitivement parti mais deux chacals traversent devant nous à toute vitesse. Il est plus que l’heure de rentrer, le jour disparait et la savane grouille. Entre déception et émerveillement, on débriefe cette journée forte en émotions devant notre repas du soir. On s’endort en pensant déjà au lendemain.

JOUR III. Réveil 4 heures. On se lève tous les jours un peu plus tôt, pressés de rencontrer cette faune matinale en pleine activité. Le léopard n’est pas revenu. Mais une nouvelle rencontre nous attend un peu plus loin. Un guépard trotte dans la forêt. Cette fois bien visible. Et si c’était notre grand jour de chance ? Parce qu’il y a encore un animal dont on n’a pas encore vu la trace. Le roi de la jungle, vous voyez qui on veut dire ? Et On imagine mal quitter le parc sans l’avoir rencontrer…

On multiplie nos chances de croiser un lion, en traînant autour de Satara, où beaucoup de touristes se targuent d’avoir croisé sa route. Rien à l’horizon. Enfin, rien, sauf des zèbres, des impalas, des gnous, des girafes, des singes, des phacochères… Non, on ne va quand même pas se plaindre ! On rejoint deux voitures arrêtées devant un grand espace à découvert. Nous on ne voit rien. On repart quand la conductrice d’un des deux véhicules nous stoppe : « Vous l’avez vu ? » ; « Non, quoi ? » ; « La lionne sous l’arbre ». Marche arrière, on sort l’objectif et on observe mieux cette fois. Oui elle est là, à environ 200 mètres, notre première lionne. On en crie de joie. On coupe le moteur et on l’observe vingt bonnes minutes, expliquant à notre tour à toutes les voitures qui passent la présence de la femelle.

La féline est loin, qu’importe, on a réussi notre journée. On repart gaiement, sans savoir que le meilleur est devant nous. On sort de l’asphalte pour prendre une boucle. À quelques mètres de reprendre la route, on aperçoit un rhinocéros ! On est seuls, cette fois personne pour nous dire où regarder. Il traverse la route devant nous. Le cœur encore tout palpitant, on écoute deux touristes qui nous demandent si on a vu un lion dans le coin. Non, pas vu. Pris d’un doute Mathieu fait demi-tour. Une autre voiture s’arrête. On parle rhino, puis lion : le fauve est tranquillement installé à 100 mètres de là dans les bosquets. Le plus dur dans ces moments-là c’est de garder son calme, de ne pas appuyer sur l’accélérateur. On repère un groupe de voitures. Une place se libère et à dix mètres de nous : un lion. Il se lève et s’en va. Nous avons tout juste le temps d’immortaliser ce moment avec l’appareil photo. Une halte s’impose. Trop d’émotions en une matinée.

Il nous reste deux nuits dans le parc. On les passera dans le camp Skukuza. Certes le plus grand mais aussi l’un des plus centraux. On dépose nos affaires dans le bungalow. Et on repart observer les berges de la Sabie river. On regarde depuis un pont un hippopotame comme on a rarement vu d’aussi près, quand un groupe accompagné d’un guide nous informe : plusieurs lionnes auraient pris en chasse un buffle pour ensuite tranquillement le dévorer. La dernière fois qu’on les a vues, elles étaient de l’autre côté de la rivière. On arrive trop tard, les lionnes sont parties. On ne peut pas gagner à tous les coups. C’est la loi de la savane. On repart sous les lumières du soleil couchant retrouver notre bungalow. Ce soir, on trinque avec deux bières fraîches à notre incroyable journée. Persuadés que demain ne pourra être meilleur. Et pourtant.

JOUR IV. Il nous aura donc fallu plusieurs jours pour pouvoir dire que l’on a aperçu le Big 5. Et encore, avec un léopard en demi-teinte. On ne se doutait pas qu’on allait avoir la chance d’observer un tout nouveau Big 5 en une seule journée. Surtout avec un début de matinée calme. Trop calme. On longe la Sabie River depuis près de deux heures. On fatigue. Conduire à 30 km/heure depuis 3 jours, les yeux grands ouverts, en se levant tous les matins à 4 heures ça demande de l’énergie. À quelques kilomètres du camp Lower Sabie, des dizaines de voitures sont arrêtées. On comprend vite pourquoi : un impala mort est suspendu dans l’arbre. Ce ne peut être que l’œuvre d’un léopard. Une hyène affamée traîne sous l’arbre, impuissante, mais aucun signe du félin. On attend, il va bien revenir. En vain. Une heure plus tard, on abandonne. Pause café au camp Lower Sabie.

On repart par la Salitje Road, où les lionnes ont attaqué le buffle la veille. Nouvel attroupement de voiture sous un arbre. On s’insère au plus près pour constater qu’un impala mort est suspendu dans les branches. Décidément… Deux minutes tout juste après avoir éteint le moteur, le léopard surgit et attaque son festin. On est aux premières loges. Le spectacle est fascinant (quand on fait abstraction de l’état de la pauvre antilope). À 20 mètres de nous, un léopard casse sa croûte impassible, sous les yeux de dizaines de touristes. Impossible de savoir combien de temps dure la scène. On se décide enfin à partir quand le léopard rassasié monte dans les branches hors de notre vue, prêt pour sa sieste bien méritée. Euphoriques, on repart.

500 mètres plus loin. Nouvel attroupement : quatre lionnes prennent le soleil sur les rochers. Cette journée est complètement folle. On n’est pas remis de notre première rencontre que la nature surenchérit ! On arrête toutes les voitures que l’on croise : « lions à 400 mètres, léopard à peine plus loin ». Le sourire des autres visiteurs à cette annonce mérite vraiment de perdre un peu de temps. Le safari est bien une activité collective. Seuls, nous serions probablement passés à côté de beaucoup de choses.

On repart heureux vers le camp. Jamais deux sans trois. Des voitures sur le bord de la route. Qu’est ce que ça peut être cette fois ? Rien de mieux que ce qu’on vient de voir sans doute. Erreur. Un lion et une lionne se câlinent à 20 mètres de la route. On a passé deux heures sans apercevoir le moindre impala et voilà qu’en moins de temps, on vit trois moments intenses. Excitants. Impossible de rester de glace. Et chaque rencontre avec la faune est unique. Rien n’est comparable. On n’est jamais rassasiés. Et ça ne vaut pas que pour les félins. On croise la route de nombreux éléphants. Chaque fois c’est le même sentiment d’émerveillement.

Une heure de pause et on repart. On aperçoit une famille rhinocéros au loin. Puis on croise cette voiture. Un homme semble désemparé. Un impala vient de sauter sur sa route. Il l’a percuté. L’animal vit encore mais sa plaie est profonde. Il lui reste probablement peu de temps à vivre ; les charognards ne lui laisseront aucune chance. Face à lui, de l’autre côté de la route, une vingtaine de ses congénères le regardent, impuissants. On quitte ému cette terrible scène. Plus loin une meute de hyènes se préparent pour leur chasse de nuit… Pour la première fois, on rentre dix minutes avant la fermeture des portes. C’est notre dernière nuit à l’intérieur du Parc Kruger, et déjà, on sait que ces cinq jours feront partis des meilleurs moments de notre voyage.

JOUR V. Le réveil sonne. 4 heures du matin. On a pris le rythme et on veut profiter de notre dernière journée. On compte sortir par la porte Malelane au sud, à 60 km de Nelspruit où on passera la nuit. La savane est calme ce matin, tant du côté animal que du côté des touristes. On croise peu de monde. On va multiplier nos chances en approchant un point d’eau. À 3 km du réservoir, soudain, un léopard traverse la route sous nos yeux et prend le sentier à droite. On a juste le temps de comprendre ce qui nous arrive ; on le suit. Il marche au pas, nous ignorant. S’arrêtant à l’envie. On est seuls : il n’y a que lui et nous.

Une autre voiture nous rejoint. Nous sommes des privilégiés, d’autant plus que la rencontre se prolonge, pendant que dans les buissons un rhinocéros broute tranquillement et qu’au bout du chemin un porc-épic trace sa route. On ne sait plus où donner de la tête. Le léopard rejoint les bosquets et s’éloigne, on cède notre place à d’autres voitures. On retourne profiter du rhinocéros. Puis allez, comme un point d’eau est sur cette route, on repart finalement vers le léopard. Il est loin du chemin. Quatre voitures patientent. On a tout juste dépassé les véhicules que le léopard sort de nulle part et passe juste sous nos portières. On tremble derrière notre fenêtre, un peu trop ouverte. On le suit une nouvelle fois sur la route en tête de file. Quand on vous dit que c’est une question de chance. Il repart dans la forêt. On poursuit jusqu’à un point d’eau : des voitures observent une lionne. Ça n’arrête jamais.

Un éléphant nous bloque le route, une petite dizaine de rhinocéros se laisse photographier, des zèbres, des girafes et des buffles en pagaille. Une fois encore : Big 5 dans la journée ! Il est déjà temps de quitter le parc. Une fois la porte franchie, on ne peut pas s’empêcher de scruter les bas-cotés de la route, comme si un animal allait encore surgir de nulle part. Un effet secondaire des séjour prolongés au Kruger. Autre effet, moins appréciable : redécouvrir la conduite sur les routes sud-africaines. Les 4×4 locaux ont l’habitude de dépasser les 110 km/h autorisés. On vient de passer 5 jours à 30 km/h. Quand notre compteur affiche 70, on a l’impression d’être déjà à fond. La relativité de la vitesse. Il nous faudra plusieurs dizaines de kilomètres pour oser dépasser les 100 km/h. De toute façon on a encore la tête ailleurs. Pour longtemps.

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